Aux voyageurs qui auraient l’idée saugrenue de traverser l’Utah, on suggère d’éviter de passer par Abalone. Ceux qui décident de s’y rendre, par négligence ou par folie, n’y reviennent pas souvent. La poudre a toujours su parler, elle. Pas les riverains. Les âmes égarées établies ici sont toujours regardées de la même façon dans l’Etat, mélange d’arrogance et de crainte. Il y a peut-être du danger dans la douce folie qui règne sur la ville. Après tout, il s’est passé suffisamment d’horreurs pour que la méfiance soit de mise. Si l’on veut être honnête, il faut avouer qu’il y a encore des raisons de s’inquiéter d’Abalone Gulch. Il y a quelque chose de surnaturel là-bas.
Nous pourrions parler des heures des excellents résultats de ses étudiants dans un Etat possédant une si mauvaise presse, de la croissance rapide des entreprises qui s’y installent quand bien même la ville paraît rurale, ou encore de l’auteur de livres à succès qu’elle habite et qui draine parfois des âmes égarées venues voir les lieux quelques fois évoqués aux travers des lignes. Nous n’en ferons rien. A dire vrai, personne n’évoque trop souvent ces lieux. Les autorités rechignent à se rendre dans ce qu’elles qualifient de zone de non-droit tant les pots de vin qui émanent du manoir au nord de la ville sont conséquents, les médias ont fui les lieux depuis que de fréquentes disparitions de matériel leur ont fait comprendre qu’on n’aimait guère leur présence.