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 Jazz Blueberry

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MessageSujet: Jazz Blueberry   Jazz Blueberry Icon_minitimeMer 16 Déc - 15:49

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(c) Mes petits doigts de fée. Passant, si tu prends ces images, je t'assure que tu ne pas rester photogénique bien longtemps.
JAZZ LUKE BLUEBERRY
20 ans ; Ploum Ploum ; 10° année
Mélomane ; Sarcastique ; Menteur ; Impulsif ; Secret ; Attentionné ;





    ♣ I AM AN OUTSIDER
    Prénom ; Elodie
    Pseudo ; Elyon
    Âge ; 16 ans
    Avatar ; Mathias Lauridsen
    Comment avez-vous connu BE ; L'illumination céleste. Un perroquet déguisé en Saint-Esprit est venu se poser sur ma tête, et il battait des ailes comme les pans de mon bonnet. On l'appelait ... Loulou. Si vous n'avez pas lu "Un cœur simple" de Flaubert, alors, oui, vous risquez de ne pas comprendre..
    Tout compte fait (sur mes doigts), c'est peut-être par Pub-rpg design.
    Que pensez-vous du design ; Je vous déteste. Parce que moi, découper proprement des personnages, je sais pas faire. Et du coup, bah j'en crève de jalousie comme ... Comme un ballon de baudruche qui se serait pris un javelot. Donc, j'aime bien. Beaucoup même. C'est sobre, élégant, raffiné.
    Commentaires ; Sauvez un balai, mangez un sorcier.




    ♣ STORY OF A LIFE TIME



I



Il avait déjà écouté de la musique avant, ce n’était pas la question. Ce jour-là avait été différent. Ses parents s’occupaient de Druella à l’autre bout de la maison, on l’avait laissé tranquille. Il était grand, maintenant. Il avait presque sept ans. Druella, elle, c’était encore une petite qui avait besoin qu’on s’occupe d’elle. Jazz s’imaginait plutôt comme un aventurier des temps modernes dont la terra incognita se serait résumée à la maison et au jardin, sous la surveillance de la Couronne des Blueberry qui organisait les expéditions.

Pour une fois, l’explorateur était libre de découvrir le monde ! Il allait classifier de nouvelles espèces, découvrir de nouvelles contrées …

Oh, la belle étagère ! Jazz posa ses yeux émerveillés sur le portant de bois. Il y avait combien de boîtiers posés dessus ? Il reconnaissait quelques tranches. Ca, ce devait ce compositeur allemand ou autrichien au nom bizarre. Ça, c’était une chanteuse anglaise que sa mère écoutait … Il avait pioché un cd au hasard. La pochette représentait un concert. Les musiciens du groupe se détachaient du fond lumineux dans la nuit. On apercevait des spectateurs aux premiers rangs. Bon, il allait toujours écouter pour voir. Il avait sorti le cd délicatement, de peur de se faire gronder s’il l’abîmait. Chez les Blueberry, on a la valeur de l’argent. Ses parents le lui répétaient parfois. Pas si souvent que ça, il n’était pas un enfant très exigeant. Sans passion, on n’a pas grand-chose à réclamer pour jouer avec ou s’y intéresser. En générala, c’est Druella qui choisissait les jeux. Elle trouvait une idée abracadabrante, il suivait sans se plaindre. La voir sourire, c’était agréable. Au point qu’il accepte ses caprices, par exemple lorsqu’il lui prenait l’idée de faire du cheval et monter sur le dos de son frère.

Reproduisant les gestes de ses parents, il avait allumé la chaîne hi-fi, tourné le bouton du volume, ouvert la trappe et mis le cd. Les premières notes lui avaient plu sans qu’il sache pourquoi. Puis la voix était venue, il était restée bouche bée, surpris par un flot d’émotions.

On aurait dit que ça valait tout ce qu’il y avait eu avant. C’était mieux que tout les instants qu’il avait aimés. Ca ne se comparait pas. Ca n’entrait dans aucune case. C’était extraordinaire, voilà tout. Mais qu’est-ce qu’il pouvait y avoir de si beau dans la musique pour lui donner envie de rester assis là, en tailleur, les mains sur ses pieds blottis dans des chaussettes et ne jamais se relever ? Qu’est-ce pouvait y avoir de si beau dans la musique pour lui clouer le bec, pour clouer le temps, pour suspendre le compte de l’horloge au plafond ? Qu’est-ce qu’il pouvait y avoir de si beau dans la musique pour qu’il sente qu’il se passait quelque chose qui se revivait peut-être cent, mille, un million de fois mais qui vous transporte toujours, qui commence par vous faire bouger timidement la tête sans s’en rendre compte, taper le rythme alors que vous n’avez pas pris de cours de solfège, bouger, bouger. Bouger les bras, esquisser des mouvements dans ses mains, comme pour un claquement de doigts qu’on n’ose pas produire. Parce qu’on ne brise pas la musique, parce qu’on s’y joint, qu’on se donne à fond dedans. Il n’y avait pas pris garde, avait commencé à bouger doucement. Ses lèvres, animées d’une vie propre avaient murmurées les paroles qu’il devinait. Il ne connaissait rien de cette chanson, mais quelque chose au fond de son être lui soufflait la suite. C’était instinctif. Pas envie de se laisser porter par le courant, il fallait y plonger. Directement. Pas de questions, juste le sentiment.

Les livres, ça se contentait de créer des rêves. Le dessin, ça créait des impressions. La musique, ça passait directement. Pas de détour, tout droit jusqu’aux émotions, tout droit jusqu’au flot de sensations qui vous inonde. Ça touche l’âme, ça la met en joie. Ça touche le corps, ça le met en transe. Il n’y avait pas d’âge pour le comprendre, pas d’âge pour le ressentir.

C’était le langage universel. Celui qui se fichait que tu sois chinois, athée, indonésien, noir, albinos, opiomane, soviétique, imparfait, sud-américain, végétarien Le truc niché au plus profond de vous et qui n’attends qu’une occasion pour dire qu’il est là, qu’il prend les commandes, et tant pis si le reste du monde ne suit pas !

On avait commencé à entendre la musique à l’autre bout de la maison. Les vibrations sur le sol parlaient de l’arrivée prochaine de Druella et des parents un peu affolés. Qu’est-ce qu’il se passait, qu’est-ce qu’il se passait ? Un truc dont ils n’avaient pas idée. Le déclic, le claquement de doigts au milieu du silence pour Jazz. Il les avait vus s’approcher, avait tourné la tête vers eux. Il ne les entendait pas. Il n’entendait que la musique, ne voulait entendre que la musique qui l’avait transpercé, qui continuait de communiquer avec lui. La porte était trop loin pour qu’il la ferme avant leur arrivée. Il ne voulait pas briser la musique avec un « non » qui n’avait pas sa place.

Il avait senti quelque chose d’autre qui montait en lui en emportant tout sur son passage, qui se mélangeait à l’émotion de la musique. De la colère ? De l’obsession ? Ou peut-être l’une de ses émotions qui ne se décrivent pas, qu’on ne peut « que » vivre mais qui sont quelque chose d’extraordinaire. Pour la deuxième fois, il y avait quelque chose pour lui clouer le bec, clouer l’horloge, suspendre le temps et surtout, lui donner envie de faire quelque chose. D’arrêter de se poser les questions, prendre les commandes et tant pis si le reste du monde ne suit pas ! Il avait poussé sa main. Sa main avait poussé la porte quelques mètres plus loin. Sa main l’avait fermée brusquement, claquée même. Il n’y avait rien eu, pas un son. La musique avait continué de se déverser sans interruptions. Jazz avait fredonné l’air, repris le refrain. De l’autre côté, ses parents n’avaient rien dit, avait retenue leur impatience, freinée leur émotion. Leur fils était sorcier.



II



Par chance, les Blueberry habitaient dans une maison déjà isolée de la ville. Il ne suffisait à Jazz qu’un quart d’heure pour être sorti de la civilisation et contempler à perte de vue des champs. Son amour des grandes promenades modifiait peut-être sa perception des choses, mais il lui semblait que la demeure familiale était l’un de ses domaines ruraux dont on parle tant dans les livres du siècle passé.
Maintenant que leur père avait moins peur de les laisser vagabonder ainsi, Druella et lui s’en allaient souvent à travers champ, et marchaient sans direction précise. Ils finissaient toujours par revenir, plus ou moins tard à la maison. Ça ne se faisait qu’en été, ces longues balades. En hiver, ils avaient les batailles de boules de neige, les bonshommes que Druella aimait encore confectionner même si son frère trouvait cette habitude désuète.

Ce jour-là, Druella était allée chez une amie. Elle lui avait encore demandé, la veille, en plaisantant s’il pourrait survivre. En plaisantant lui aussi, il avait répondu, théâtralement, qu’il ne savait pas s’il en trouverait la force ! Dieu, que le temps lui serait long jusqu’à son retour ! Mais allons, pas de sentimentalisme, tel l’oiseau qui s’envolait dans le ciel clair du matin, il fallait que s’en aille au loin. Cette tirade finie, il avait bien vite changé de sujet. Ils n’en avaient plus reparlé. Le lendemain matin, quand Druella avait voulu le voir avant de partir, il avait fait semblant de dormir d’un sommeil profond. Jamais il ne lui avait semblait qu’il allait être démasqué si vite, qu’elle saisirrait son visage, enlèverait d’une main vive et incapable cet être détaché qu’il se donnait. L’élastique sur sa tête devait tenu bon puisqu’elle s’en alla sans bruit.

Comme les jumeaux, il s’était senti délaissé. Il avait éprouvé une tristesse d’enfant abandonné, à qui l’on vient d’enlever son unique camarade de jeu, celui autour duquel toute sa vie tournait. Il s’était repris. Mais quel âge avait-il, hein, pour se laisser aller à ce genre de sentiments ? Sa fierté de jeune homme l’avait dissuadé de continuer à se lamenter comme ça. A la place, il avait ressenti de la rancœur envers cette fille qu’il ne connaissait que de vue et à qui il n’aurait jamais eu envie de parler : et pour cause, elle lui volait sa sœur, cette mijaurée !

C’était la première fois qu’il partait tout seul, il en éprouvait une sensation curieuse et désagréable. Il y avait des jours où la présence de Druella et sa Cour d’admirateurs abrutis lui était insupportable. Il les toisait d’un œil méchant, et faisait tout son possible pour les ignorer. Cette fois-ci, la présence de Druella lui semblait ô combien désirable, et il aurait presque était prêt à supporter deux ou trois de ses suivants. Pas trop quand même. Homme ou femmes, voir des personnes tourner autour de sa petite sœur l’énervait et l’aidait à développer une inimitié forgé par une profonde jalousie. Elle ne lui appartenait pas, pourtant. Pas plus qu’il n’aurait été en droit de se montrer jaloux quand, à défaut de courir les jupons, il tombait amoureux une, deux, dix, cent fois par jour peut-être. « Cœur artichaut » disaient avec raison ses proches.

Il était parti seul, dans le ciel clair du matin. Sa silhouette se découpait dans le fond bleu quand il était au sommet d’une colline. C’est que l’endroit était vallonné, après tout. Les landes anglaises de l’endroit lui rappelaient toujours ces paysages d’Irlande verdoyant qu’on voit sur les photos des agences de voyage. Ils avaient quelque chose d'irréel, d’aussi verglacé que du papier photo. Peut-être parce qu’il faisait froid, et qu’il était trop peu vêtu. Il avait compté sur le froid pour le réchauffer. Peut-être que mettre quelque chose à manches longues sous sa veste noire –la veste fétiche qu’il gardait encore des années après, parce qu’il avait eu la lubie de la choisir un peu trop grande lors de l’achat -. Son polo blanc lui semblait bête.
Au rythme de sa marche, sa mauvaise humeur s’était apaisée. Comment rester seul quand on court la campagne ? Et puis, il s’habituait à tout. Il s’était toujours habitué à tout. Les plus grandes peines s’effaçaient vite pour lui, les joies se dissipaient aussi. Il lui arrivait d’être au sommet, et le lendemain, il redescendait sagement sur terre sans qu’on ait besoin lui dire. Il sombrait parfois, et il suffisait qu’on vienne le relever pour que tout se brouille dans sa mémoire dès le lendemain. Il était facile à vivre, si l’on exceptait ses réparties souvent blessantes. Avec un père trop doux, il avait toujours été tenté de repousser ses limites, de voir jusqu’où on pouvait le supporter. C’était plus facile avec sa mère. Combien de fois lui avait-il mises ces paires de claques si méritées lorsqu’il se montrait odieux ? Son père hésitait plus, partait du fait qu’une mauvaise relation père-fils finissait toujours mal. Il préférait se montrer présent pour son fils, espérant que celui-ci lui confierait ces problèmes. Mais Jazz n’avait pas envie qu’on s’occupe de lui, qu’on le materne quand sa mère préférait « l’élever à la dure ». Pas qu’il ait eu peur de passer pour une chochotte, ou de se voir attaché un sobriquet de ce genre. Mais il aimait se dire qu’il était libre. Que s’il lui prenait l’envie, il plaquait sa vie du jour au lendemain, laissant derrière lui parents et sœur comme d’autres la famille avaient laissés femmes et enfants. Au fond, il ne voulait pas blesser les gens.

Et il avait réfléchies à ces considérations toute la matinée. A midi, son estomac l’avait prié de manger quelque chose, et il s’était rendu compte qu’il aurait faim lorsqu’il rentrerait ce soir. Car il était exclu qu’il rentre avant Druella et ne se retrouve à tourner en rond dans la maison, balançant entre l’idée qu’elle allait arriver et celle qu’il pouvait bien faire autre chose en attendant. Plus le temps passerait, et plus le choix le blesserait. Jusqu’à ce qu’il l’entende rentrer et se jette dans ses bras, repoussant les limites du ridicule. Non, non, il ne rentrerait pas plus tôt.

Il s’était donc habitué à la faim et aux courants d’air. Quand le soleil était encore à son zénith, bien rond dans le ciel, il avait même voulu poser sa veste. Il l’avait remise sur ses épaules quelques minutes plus tard, toute fierté tombée. Qu’importe, puisqu’il n’y avait personne pour s’en amuser.

Il avait passée l’après-midi à vagabonder. A la tombée de la nuit, il s’était inquiété, avait craint de ne pas retrouver son chemin à temps. Que ses proches s’inquiètent, alors que quelques heures auparavant l’enfant jaloux qu’il était ne demandait que ça. Il avait pressé l’allure. Il lui semblait que son souffle laissait de petit nuage dans l’air. Il aurait aimé qu’ils soient ronds.

Il avait pris la décision de couper court par un terrain un peu plus boisé qu’il connaissait moins. S’il allait en ligne droite, il n’y avait pas de raison que les grandes rangées d’arbres l’empêchent de sortir. Une fois enfoncé dans le chemin, il y avait vu des barreaux. S’il avait été un peu moins affolé, il aurait rit de cette peur qui l’envahissait. C’est qu’il y en avait bien d’autres, des raisons d’avoir peur. Quand on est sorcier, on est aussi exposé à tous les dangers magiques dont les moldus ne se doutent jamais.

Il avait marché sur une branche. Derrière lui, un craquement avait retenti presque au même moment. Il s’était retourné d’un bloc en essayant de changer l’expression de son visage. De quoi aurait-il donc eu l’air devant un voyageur, avec son air pâle et décontenancé ? Il n’avait pas aperçu de silhouette humaine, été intrigué. Allons, il y avait bien quelqu’un d’autre qui empruntait ce chemin. Il avait marché à reculons, quelques pas timides dans l’espoir que ses yeux lui montreraient un autre individu. Il n’y avait rien à hauteur d’homme.

Les deux rangées d’arbres étaient surélevées par rapport au chemin. Il avait fallu aplatir la route pour permettre aux voitures qui pourraient se trouver là de passer. Une ombre dévala de la colline et tomba sur la route, hagarde, le souffle rauque. Elle tourna la tête des deux côtés. Ne vit rien à gauche. Vit Jazz à droite, ce qui ne constituait pas grand-chose. Il semblait au garçon que ce regard sauvage et malsain s’attardait sur lui pour le faire fuir, ou pour l’emprisonner. Au fond, il n’en savait trop rien.

Les prunelles d’un rond parfait remontèrent sur sa silhouette, ses jambes frêles.. Jazz s’imaginait le pire. Peut-être que cette bête sauvage, ce chien-loup allait se jeter sur lui et l’attaquer. Que pourrait-il faire ? S’enfuir ? Il n’irait jamais assez vite. La fatigue de sa journée empêcherait toute bouffée d’adrénaline salvatrice. Son buste, ses mains trop larges aux paumes mais aux doigts trop fins. Par quelle idée stupide n’avait-il pas voulu prendre sa baguette ? Les sortilège qu’il connaissait auraient au moins pu effrayer l’animal. Son visage. Leurs yeux se rencontrèrent. D’un regard curieusement doux, la bête le toisa quelques minutes. Elle s’en alla dans l’autre direction, d’un pas lent et paisible, celui du voyageur qu’il connaît la contrée et s’amuse bien que vous ayez refusé son aide par fierté.

Jazz rentra à la maison plus tard que chez lui. Ses parents étaient inquiets, Druella aussi. Pourquoi n’avait-il pas laissé un mot ? Il n’en savait rien. Enfin, bon, au moins, il allait bien. Ca s’était bien passé, hein ? Oui oui. Heureusement. Ils avaient failli appeler la police, il s’en doutait de ça, monsieur l’explorateur ? Un peu, mais il avait eu autre chose à penser. Il avait mangé en vitesse, sans un mot, n’ayant rien à raconter de cette journée, si ce n’est qu’il avait marché.

Même à Druella, il n’avait rien osé dire du chien-loup. Il y avait quelque chose dans le regard de cette bête qui le tracassait. Une lueur trop humaine pour ne pas retenir son attention et forger dans son esprit des cauchemars pour la semaine. Puis la sensation s’estomperait. Il retrouverait son calme. Du moins l’espérait-il.



Dernière édition par Maître du Jeu le Dim 27 Déc - 23:22, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Jazz Blueberry   Jazz Blueberry Icon_minitimeDim 27 Déc - 23:19



III


Comment avait commencé ce défi idiot ? Il ne s’en souvenait plus. Peut-être une histoire de filles. Il avait pris cette histoire comme une affaire d’honneur de la plus haute importance, oubliant les conséquences. On a pas idée de jouer à l’homme à dix-sept ans, que ce soit la majorité sorcière ou non.
Il avait répondu qu’il était tout à fait capable d’aller dans la forêt interdite. On lui avait confié un appareil photo magique, il devait photographie une créature précise et ramener le cliché. Il parti avec un ami, lui aussi piqué par cette querelle d’honneur. Au fond, sans doute son camarade l’avait-il suivi pour ne pas le laisser seul. Jazz n’était pas fascinant comme pouvaient l’être sa sœur ou leur grand-père Grymm. Il leur avait déjà toujours envié cette aptitude qu’ils avaient à « mettre les gens dans leur poche », imposer une autorité naturelle. Lui, les gens le suivaient parce qu’ils avaient confiance. Parce que même s’il devenait que la tête de ce grand garçon au regard mouvant était remplie de rêves et d’une douce fantaisie, il restait curieusement attaché à la réalité. Il semblait se déplacer sur un fil. A l’une des extrémités, les chimères de sa sœur, les rêves de son esprit bercé d’illusions. A l’autre bout, la dure réalité. On aurait dit qu’il n’avait pas peur de chuter. Il courrait, dansait, sauter sur la corde raide comme un funambule à son affaire. Etait-ce parce que son grand corps se déplaçait d’une manière singulière et hésitante que son esprit se sentait obligé de faire l’inverse, se déplaçant avec assurance sur un chemin hasardeux ? N’était-ce pas plutôt nos impressions d’adolescents, la vision que le Quidditch nous donnait de lui ? Il n’avait après tout pas abandonné l’équipe, à cette époque.

En s’introduisant dans la forêt, il n’aurait même pas conçu qu’il puisse lui arriver quelque chose. Son ami et lui s’étaient séparés de quelques mètres. Jazz avait entendu le déclic de l’appareil photo, s’était détendu. La créature avait surgi sans prévenir. Il avait renversé le jeune homme d’un bond. Plaqué au sol brutalement, sa tête avait heurté la terre : s’était penchée en avant de rebondir brusquement en arrière dans un craquement. Il n’était pourtant pas mort, pas tout à fait inconscient. Il eut le temps de crier, par réflexe. Que pouvait-il faire d’autre, pauvre humain qu’il était ? Déjà, le loup avait pris ses repères, posait une patte sur la nuque du garçon et l’une de ses griffes y creusait un sillon. Lorsque sa gueule se referma sur la jambe de Jazz, celui-ci n’avait déjà plus la force de crier. La douleur lui arracha un frisson, peut-être un spasme. Il laissa reposer sa tête sur le sol. Son visage perdit la grimace qui s’y était figée, la douleur passa aussi fugitivement qu’un nuage chassé par une éclaircie. Il faisait pourtant nuit noire à ce moment. Il n’y eut guère que la lune pleine et un sortilège lancé pour apporter une lueur.




IV


Il s’était réveillé avec un goût désagréable dans la bouche et une chanson familière dans la tête. Plus que d’être allongé dans un hôpital, il avait été surpris de voir tant de monde autour de lui. Est-ce qu’il avait fait une bêtise ? C’était impossible à dire. Le fil rouge de l’image était branché, mais le blanc et le jaune qui permettaient l’ouïe devait pendre quelque part. Bon, il ferait sans. D’ailleurs, il avait bien assez à voir. On se tournait vers lui. Sa sœur au visage embué de larmes, Grymm qui paraissait rassuré, l’infirmière qui devait exhorter tout le monde au silence … Et … Et son père ? L’espace d’un instant, Jazz n’y prêta pas attention, mettant cette vision sur le compte de sa fatigue. Tiens, peut-être devrait-il dire à l’infirmière que c’était gentil de demander le silence mais bien inutile car il n’entendait rien … Jamais ses pensées ne lui avaient semblées aussi décousues de sens. C’était rare, ça. D’ailleurs …
Minute. Son père était là ? Jazz se tourna vers lui et son visage se tordit dans une grimace qui aurait pu être amusante sans les pansements qui la parsemaient. Son père, ici ? Qu’est-ce que c’était que ce délire ? Il était mort, ça y est, on l’enterrait ? Pourquoi l’enterrait-on ici ? Il aurait été mieux à l’air libre d’un jardin … Enfin, air libre six pieds sous terre, mais entouré de végétation.
Ses yeux se posèrent sur le rond de l’horloge dont il ne lut pas l’heure. La forme lui évoqua en revanche quelque chose. L’écho d’un passé lointain, hurlé à l’océan.
Non, il ne pouvait pas être mort. On ne se serait pas tourné vers lui de cette façon. Mais est-ce que c’était son enterrement ? Va savoir … Où était passé le prêtre ? Non, il n’était pas croyant, c’est vrai. Ca ne lui disait pas ce qu’il advenait quand même : que se passait-il, il ressucitait ? De quoi était-il mort, d’ailleurs ?
Brusquement, le son se connecta avec un « bump » de chaîne stéréo qui commence. Ah, bon. Il entendait tout maintenant. L’infirmière qui disait de le laisser respirer. Druella qui se jetait à demi sur lui (elle était d’une logique désarmante, sa petite sœur) et tentait de l’étouffer en répétant qu’elle était rassurée, qu’il lui avait fait peur, qu’elle était rassurée … Son père qui lui caressait les cheveux en demandant si ça allait, mon grand. Grymm qui ne disait mot.

« Qu’est-ce qui se passe ? » demanda-t-il enfin, le plus innocemment du monde.

On lui expliqua tout, en plusieurs versions, à plusieurs voix qui se mêlaient les unes aux autres et lui donnaient une folle envie de mettre de boules quiès, se lever et partir un peu plus loin. Lui. Pote. Forêt. Agression. Loup-garou. Ah bon, il était loup-garou, maintenant ? Pourquoi est-ce qu’on ne parlait pas de ce genre de choses plus tôt à Poudlard, c’était un choix de carrière intéressant, non ? Il s’apprêtait à poser cette question quand il se rendit compte que ça n’avait pas de pertinence. Loup-garou, ce n’était pas un choix de carrière. C’était un truc différent qui ne servait à rien dans les études. Une perte de temps … Quoique non, il fallait qu’il arrête de penser rentabilité. Il ne prenait pas des cours de chant pour être chanteur –quoique ça lui aurait plu de se retrouver de l’autre côté de la scène un jour- après tout.

« Ca fait quoi, d’être un loup-garou ? » redemanda-t-il

On lui expliqua que c’était ce qui pouvait arriver de pire. Qu’à présent, il allait devoir subir une transformation douloureuse par mois, chaque fois que la lune serait pleine, et patati patata. Tous les clichés qu’il y avait sur les loups-garous. D’une certaine manière, la plupart des loups-garous devaient aimer se faire plaindre.
Interlude musical. Ils ont des chapeaux ronds, vivent les bretons. Ils ont des chapeaux ronds vive la Bretagne. Les explications continuaient, et il ne souhaitait toujours pas s’y intéresser. Les doux rêves sont faits de ça. Qui suis-je pour m’y opposer ? Déjà, par habitude, il ouvrait la bouche pour laisser sortir sa voix. Mais les visages angoissés autour de lui le poussèrent à ne pas se mettre à chanter. D’autant qu’il y avait beaucoup de monde, il n’aimait pas ça. Il voulait bien chanter pour une ou deux personnes, mais pas autant.
Tiens, son père parlait de le ramener à la maison … Eh, mais ça n’allait pas du tout ! C’était quoi ce délire, hein ? Quelle idée stupide ! Il allait se faire chier comme un veracrasse crevé, s’il rentrait ! Et ses études ? On n’y pensait à ses études ? Aux sous injectés dans Poudlard et qui ne lui reviendraient jamais pour des cds, hein ? Mais non, on ne pensait à rien !

« Mais je veux rester ici ! » clama-t-il, semblant avoir recouvré la raison. Ça ne dura pas longtemps, évidemment. Il reprit rapidement, sur un ton posé. « C’est confortable. » pensant cette fois-ci au lit sur lequel il était allongé. Ce serait un miracle s’il restait ici. Ce qui était bien triste, quand même. Parce qu’il ne croyait pas aux miracles, en fait. Alors, tant qu’à y être, tant qu’à passer pour un con devant des personnes qu’il allait être amené à côtoyer une bonne partie de sa vie, tant qu’à ruiner toutes ses maigres chances de rester à Poudlard ; il pouvait bien chantonner un peu …





V


Par miracle, il était resté à Poudlard. Il prenait le chemin de la cabane hurlante quand la lune s’arrondissait comme le ventre d’une femme enceinte.

Il faut être loup-garou pour comprendre ce qui se passe ces nuits de pleine lune. La potion tue-loup ne sert pas à grand-chose, et Jazz a tenté plus d’une fois de se débarrasser du liquide. Ce serait si facile, d’ouvrir le flacon, d’attendre que le liquide s’échappe dans un flot continu par le goulot. Ça ne durerait pas longtemps, deux minutes tout au plus. Il secouerait un peu le flacon pour faire tomber le reste du liquide. Les plantes l’absorberaient vite. On n’aurait pas de traces. Il aurait tout le loisir de se transformer.

Il avait peur qu’on le prenne pour un fou s’il disait qu’au fond, c’était quand même une expérience à vivre, de se transformer en loup-garou. Il n’en avait parlé qu’à sa sœur. Druella était bien plus folle que lui, elle pouvait comprendre. Elle avait acquiescé, sachant qu’elle ne ressentirait sans doute jamais ça. Jazz ne lui souhaitait pas. S’il n’y avait pas eu le risque de blesser d’autres personnes, il aurait laissé les transformations se faire sans y prendre garde. Comme ça, naturellement. Naturellement, ses membres se seront allongés. Naturellement, il aurait refoulées ses angoisses d’étudiant, oubliées les bonnes notes dans des matières dont il n’avait que faire, oubliées les filles qui lui faisaient tourner la tête. Il aurait laissé ce qu’il y avait de plus simple, de plus naturel peut-être reprendre sa place. Une place qu’il avait peut-être toujours laissée vide à cet effet. Il n’avait pas eu d’autre passion que la musique qu’il écoutait sans en jouer. Pas eu d’autre sport que le Quidditch qui ne lui avait pas manqué autant qu’il croyait quand il avait décidé d’arrêter. Pas eu d’autre différence que les autres enfants, que les autres adolescents, que les autres sorciers. Il s’était fondu dans la masse, dans l’ombre de sa petite sœur.
Aujourd’hui, se dissimuler parmi les élèves du château ne lui convenait plus. Ce n’était plus le même jeu qu’autre fois. La même envie de s’intégrer au groupe. Il ne faisait pas partie du groupe.
Il était supérieur au groupe.

La certitude s’était ancrée plus vite qu’il ne l’aurait cru. La première transformation en loup avait été horrible. La morsure l’élançait un peu, mais ce n’était pas le plus important. Il avait cru rater sa vie. Il s’était retrouvé devant le fait accompli après avoir tant cherché à l’oublier. Ça y est, c’était fini les beaux espoirs. Finie, la petite vie tranquille après Poudlard. Fini, l’emploi au chaud dans un ministère. Finie, la vie de couple avec l’élue de son cœur et plus tard la vie de famille. Bon, à vrai dire, la vie de couple, il pouvait s’en passer. Mais son ego avait pris un coup en imaginant que désormais, les portes du pouvoir lui étaient fermées. Qu’on le renverrait à la niche, si beau que soit son CV. Parce qu’un tampon circulaire y inscrirait « loup-garou » de la même façon dont on aurait marquée à vif sa chair.

Durant cette première nuit de pleine lune, il avait tenté de résister. Mis toute sa volonté dans cette tâche stupide qui consistait à empêcher le loup en lui de prendre le dessus. Combien de temps avait-il tenu ? Une heure ? Une minute ? Quelques secondes ? Il n’y avait personne pour le juger. Personne pour le retenir à cette humanité qu’il se souvenait avoir ardemment désirée, comme on s’aperçoit à quel point un être nous était cher en le perdant. Il avait perdu son humanité, c’est vrai. Il avait gagné plus.

Les œillères que sa vie de simple sorcier lui imposait avaient été levées par une main bienveillante. Il lui semblait que cette main bienveillante avait esquissé un large geste circulaire, pour lui montrer ce qui l’entourait. Ce à quoi moldus et sorciers ne prêtaient plus attention. Il avait senti sous lui l’herbe grasse, la terre qui se pliait doucement sous la pression de ses pattes, pour le laisser passer, pour l’inviter à avancer. Il avait avancé. Il avait laissées de traces de pattes rondes.

Ca n’avait pas été dur. Il avait senti des odeurs qu’il aurait trouvées désagréables en tant que pauvre humain. Ce parfum de terre fraîche dans laquelle il sentait des relents de voyageur, peut-être bien les restes de sa propre odeur, quand il s’était rendu ici, tout habillé, tout humain. Il avait senti cette odeur humide de forêt anglaise, mélange d’écorces moussues et de champignons méconnus, cette nature encore vierge de constructions moldues. Il n’avait pu s’empêcher de penser aux odeurs de son quotidien, qui lui paraissaient à présent d’une puanteur sans nom. Heureusement, il ne les sentirait pas avec cette odorat là. Elles reviendraient une infime partie d’un sens trop souvent occulté pour la supériorité de la vue ou de l’ouïe. Parlons-en, de l’ouïe.

Ses oreilles habituées au bruit, à la musique qu’il écoutait trop souvent, souvent trop fort avaient laissé place au silence en premier lieu. Durant quelques secondes, infimes, il avait entendu le silence de la forêt. Un silence complet, sans une brise de vent, sans une chouette qui hulule. On aurait dit que la forêt tout entière retenait son souffle dans un frémissement. Ce n’était pas un silence de mort. Il lui semblait que c’était tout l’inverse. Un silence pouvait-il renaître ? Se pouvait-il que cette mélodie que constituait l’absence de bruits soit intervenue à ce moment précis pour l’exhorter à écouter sa propre musique ? La musique de son corps, à laquelle il n’avait jamais pris garde. Il entendait son sang battre dans ses tempes, son souffle régulier qui laissait une brève chaleur sur son museau quand il produisait un nuage de fumée. Il avait courru. Pour que ses muscles s’affolent, pour que le sang arrive en hâte dans son corps et se fasse entendre. Le bruit avait tout d’abord été occulté par les craquements de feuilles mortes, et ces légers dérapages qu’il produisait dans la terre humide car il n’était pas encore habitué à ce nouveau corps. Il s’était amusé à faire le moins de bruit possible. Les reliefs de sa conscience humaine avaient été absorbées par cette nouvelle tâche. Après quelques minutes, il s’était immobilisé, avait pu entendre de tout son saoul ces battements de cœur qu’il commençait à aimer. Humain, il aurait trouvé ça fade et sans intérêt, préférant écouter de la musique. Désormais, il ne semblait pas y avoir d’autre musique au monde qui vaille la peine d’être écouter. Son souffle et son sang qui parcouraient ce corps à l’unisson.

Pourtant, ses oreilles s’étaient dressées à l’entente d’un bruit. Laissant son instinct reprendre le dessus, le loup-garou avait tourné la tête vers un buisson, où il savait que sa proie avait commis la sottise de s’aventurer. Il avait bondi. Un nouveau goût avait fait son apparition dans sa gorge.



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Jazz Blueberry
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